Partir en couple ou seul ? Un « huis clos » en extérieur. Si vous n’avez pas encore vécu avec votre coéquipier(e) des journées entières, la première difficulté sera celle-là. Il n’est pas innocent de partager ses jours et ses nuits avec la même personne.
L’absence d’intimité devient difficile supporter quand on voyage en couple à vélo
Il est indispensable de se ménager des plages d’isolement intellectuel. Chacun doit pouvoir rêver à son aise et son goût. Toutefois, il est tout aussi nécessaire de se réserver des moments pour être ensemble, la présence permanente de tiers devenant pesante. Rencontrer les autres c’est bien, mais on arrive aussi saturation. On se prend rêver de se retrouver seul avec l’autre pour un peu de tranquillité et d’intimité. Cette notion est inconnue dans bien des pays et les autochtones, habitués à vivre ensemble, ne comprennent pas votre souhait de vous isoler. Il faut donc trouver le bon dosage entre le repli sur le couple et l’ouverture aux autres. Cette savante alchimie est difficile à trouver mais devient automatique au bout d’un certain temps. Vivre quelque temps isolé des autres pour être ensemble, puis ensuite passer un moment avec d’autres est la bonne solution.
L’humain a besoin de compagnie, un peu mais pas trop
L’important est de pédaler dans le même sens. Ne pas perdre de vue que l’on circule à bicyclette et que pour avancer il faut de l’énergie et que malheureusement cette énergie peut manquer… Être au diapason sur la finalité du périple. Est-ce manger du kilomètre, voir un maximum de vieilles pierres ou aller à la rencontre des autres ? Le mieux est un savant cocktail des envies de chacun. Certains privilégient l’effort physique, seul l’engagement compte… Prendre la piste défoncée est la seule solution envisageable, fi de la bonne route goudronnée si agréable sous les roues. D’autres préfèrent suivre impérativement le guide touristique et visiter un plus grand nombre de sites.
Lors d’un long périple à vélo, l’esprit peut saturer rapidement
Que sont des ruines sans leurs habitants et leurs histoires ? Il faut surtout accepter les différences, nul n’est identique l’autre ! Lève-tôt ou couche-tard, là est la question ? Les minimes différences à la maison, si elles peuvent être agaçantes, deviennent sur la route des sources de conflit dangereux. Pourquoi part-on si tard alors que le soleil brille depuis longtemps et que l’on va souffrir de la chaleur ? Pourquoi s’arrête-on déjà, alors qu’il est encore possible de rouler plusieurs heures ? Manger léger ou au contraire un repas roboratif ? Ces détails du quotidien prennent une importance fondamentale au fur et à mesure des jours de route. Le syndrome du compteur est très dangereux. Vouloir en faire toujours plus. « Comment, seulement x km aujourd’hui, c’est nul ! On continue. » Oui… mais qui veut aller loin doit ménager sa monture. Aujourd’hui, si l’un est en forme, l’autre a pu passer une mauvaise nuit et être fatigué. D’aucuns sont de véritables fusées le matin et sont vidés l’après-midi, alors que d’autres sont de vieux diesels, ils ont besoin de nombreuses heures de fonctionnement avant d’être en pleine forme.
Dans une équipe il est indispensable d’être au niveau du maillon faible
Rassurez-vous, ce maillon faible change régulièrement au fil des jours ou du profil de la route. Il faut que chacun prenne conscience de ses possibilités et de celles de son partenaire. Pourtant, partir en couple présente aussi bien des avantages. Regarder ensemble dans le même sens, rester silencieux contempler un paysage magnifique. La complicité est telle que les paroles sont superflues. Un simple regard, une attitude suffisent pour se comprendre. Le voyage, plaisir fondamentalement égoïste, le devient moins puisqu’il est partagé. Le mûrissement intellectuel se fait de pair, le souhait de dénuement et de simplicité s’impose aux voyageurs.
Le retour à la maison et retrouver ses proches
Au retour, le décalage avec les amis, les proches et la famille sera déjà suffisamment important pour qu’au sein du couple il ne se produise pas. Les valeurs ont changé entre ceux qui sont restés au bord de la route et vous. Les faux problèmes que se posent les sédentaires paraissent si dérisoires que l’on est souvent dérouté. Être ensemble aide beaucoup à rester serein devant ces futilités. Un petit coup de blues ou un gros coup de fatigue, une épaule est pour vous faire repartir. La nature fait bien les choses. Il est exceptionnel que l’effondrement moral ou physique des protagonistes soit simultané, de fait l’un des deux sera toujours là pour raisonner l’autre et l’aider. Cela peut être un souci intellectuel, une peur raisonnée ou irraisonnée d’individus, de situations ou d’affronter une difficulté de terrain, un problème de blessure ou d’épuisement. L’œil de l’autre est meilleur juge que le sien pour évaluer certaines conditions et proposer les remèdes qui s’imposent.